Dans
un passé qui n’est pas si lointain, au milieu du
XIX ème siècle, la Corse vit partir pour d’autres
cieux beaucoup de ses enfants. Plusieurs facteurs les poussaient à émigrer
: un relatif surpeuplement, la misère et le faible niveau
de vie qu'offre la Corse de ce temps. La plupart, originaires
du Cap Corse ou du Nebbiu, émigrent vers l’Amérique
du Sud. Le Chili, le Vénézuela, l'Argentine et
d'autres pays de ce continent deviennent ainsi les réceptacles
de ces Corses en mal d'aventures ou de changement de vie.
Pourtant
l'Amérique Latine n'est à ce moment
la pas le seul endroit ou débarquent ces émigrants.
Outre les destinations connues et relativement plus proches de
la Corse que sont le Continent français ou encore l'Afrique,
il en est une qui interpelle véritablement car elle présente
beaucoup de similitudes avec la Corse, tout simplement parce
que c'est une île située à 800 km du Vénézuela
, elle se nomme Porto Rico.
Porto
Rico ressemble sur bien des points à la Corse,
la comparaison peut s’établir effectivement. Bien évidemment
son insularité est le premier élément, mais
au-delà de cet aspect, des particularités géographiques
existent entre ces deux îles, qui sont certes éloignées
par la distance mais proches par leurs aspects communs. Les comparaisons
sont multiples, Porto Rico peut se définir comme une montagne
dans la mer, elle possède une cordillère intérieure
relativement élevée comme la Corse, la végétation
est luxuriante, tropicale, et rappelle le maquis, ce manteau
végétal très dense et impénétrable
si caractéristique du paysage corse.
La pluie est également présente, il pleut régulièrement
en Corse qui, doit-on le rappeler, est communément dénommée
comme étant le « château d'eau de la Méditerranée ».
Porto Rico pour sa part est célèbre par sa "rain forrest" les
précipitations y sont abondantes. Des températures clémentes
règnent aussi dans ces deux îles rendant le climat agréable
presque toute l’année.
Enfin pour terminer ce petit rappel géographique, Porto Rico et la Corse
ont quasiment la même superficie, 8897 km carré pour l’une
et 8681 km carré pour l’autre.
Mais
revenons à nos Corses. Ils arrivent enfin après
un long voyage de plusieurs semaines en bateau à vapeur.
Périple parfois périlleux car devant affronter
les tempêtes de l’océan Atlantique et d’autres
dangers inhérents à ce type de déplacements.
CAFE,
CANNE A SUCRE ET TABAC |
Ils
s’installent comme Tiburcio Tollinche et ses cousins
qui arrivent en 1898, dans le sud ouest de l’île
et saisissent l’opportunité de travailler les terres
agricoles données par la couronne d’Espagne. Cette
dernière élabore une politique qui quelques années
plus tôt va favoriser l’immigration d’étrangers
issus d’une culture Méditerranéenne et catholique
qu’elle désire fixer à Yauco petite bourgade
située dans la province montagneuse du sud-ouest de Porto
Rico.
La terre est aussitôt mise en valeur et exploitée. Les plantations
de café, de canne à sucre et de tabac deviennent les activités
principales des nouveaux émigrants.
Tiburcio pour ne citer que lui devient contremaitre dans une plantation agricole
dans la province montagneuse de Guayanilla. Le hasard veut qu'il épouse
une descendante directe du Conquistador Ponce de Léon celui qui gouverna
Porto Rico au XVI ème siècle.
Ils
réussissent à faire prospérer une
agriculture nouvelle, tour de force important car ces derniers
vont au fil du temps détenir ce marché d’amont
en aval. L’agriculture devient un secteur clé des
Corses qui plantent et récoltent le café et le
torréfient. Une véritable industrie du café et
de la canne à sucre se développe dans cette région,
favorisant ainsi l’essor économique de cette partie
de l’île.
Les
Corses détiennent ainsi le monopole en matière
d’agriculture et deviennent en moins d'une décennie
les « leaders » de cette industrie et s’enrichissent
convenablement. C'est là tout le paradoxe d’une
réussite méritée qu’ils n’ont
pu accomplir chez eux.
Par conséquent, il est nécessaire de souligner
qu’une stèle
commémore le travail des Corses ( cliquez ici
)et les bienfaits qu’ils
ont pu apporter à la ville de Yauco.. Et au-delà de cette ville,
une journée des corses est célébrée le 10 septembre
dans tout Porto Rico, témoignage direct de leur contribution et par
extension de leur intégration réelle au sein de la société porto
ricaine. C'est leur nouveau pays d'adoption qui les remercie à sa manière
des bienfaits que les Corses ont accomplis.
U casone portoricanu
|
L'association des Corses de Porto Rico pratique le quadrille
corse à sa manière !
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UNE
ASSOCIATION DES CORSES TRES ACTIVE
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Ces
familles travaillent durement des terres peu accueillantes
et leurs descendants tel que le Capitaine de marine et Pilote
au port de Ponce maintenant retraité, José Luis
Rivera Tollinche et sa famille, perpétuent la tradition
de planteur de café sur la plantation que lui a légué son
grand père Tiburcio. Il continue à faire vivre
cette ancienne exploitation pour vendre ensuite son café très
réputé. De cet héritage, José Luis
Rivera Tollinche est très fier.
« Mais au-delà de cet exploitation, je suis très fier de
mes origines. Les descendants des corses ont par ailleurs créé cette
association, dont j'ai été le président durant trois années,
qui rend hommage à mes racines, l’association des Corses de Porto
Rico », explique M. Tollinche. Depuis 1984, lui et sa centaine d’adhérents,
tous d’origine corse, effectuent un travail de recherche permanent.
L'association se veut donc « un réceptacle de cette diaspora en
mal du pays d'origine ».
Des séminaires sont organisés, les thèmes variés
et concernent tout ce qui a trait à la Corse.
Sa culture, son histoire, sa langue et la généalogie sont explorés
pour faire vivre ou revivre une mémoire commune. Des voyages en Corse
sont effectués au moins tous les deux ans, une dizaine d’adhérents
redécouvrent alors les villages de leurs ancêtres et assistent
aux manifestations organisées en leur honneur. Les polyphonies corses
et la gastronomie sont savourées entre autre par l’ensemble de
cette diaspora.
« Le cordon ombilical qui relie ces deux îles est fort », précise
José Luis.
« L’association s’implique réellement à promouvoir
le patrimoine identitaire corse. Elle est en contact avec la diaspora corse
répandue
dans le monde et tisse des liens avec par exemple les Corses du Vénézuela.
Elle émet des informations pratiques de toutes sortes qui concernent la
Corse et en captent d’autres en provenance de la Corse, du Continent français
et d’ailleurs. C’est une véritable antenne qui relaie un maximum
d’éléments provenant de plusieurs sources ».
C’est pourquoi José Luis Rivera Tollinche est un homme occupé en
tant qu'un « des moteurs principaux des activités de l’association ».
Il vient dès qu’il le peut à Oletta accompagné de
ses enfants et de son épouse afin de se ressourcer. Son rêve est
de restaurer la maison ancestrale, berceau de sa famille, il redécouvre
tout ce que fait la beauté de la Corse et de la micro région
du Nebbiu. Il s’immerge complètement au sein de la société corse
qu’il retrouve et apprécie le temps d’un court séjour.
Cela traduit son profond attachement à l’île de Beauté.
José Luis Rivera Tollinche est Porto Ricain mais Corse d’origine,
il ne l’oublie pas….la Corse reste ainsi toujours présente
dans sa mémoire, son cœur, son âme.
André Cesari
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